Il y en a que le crépuscule angoisse, d’autres qu’il fascine. Gregory Crewdson fait partie des fans inconditionnels du ciel qui s’obscurcit, des lampadaires qui s’allument, des maisons qui s’éclairent et des paysages qui se transforment; c’est lui qui le dit ‘j’ai toujours été fasciné par le crépuscule. Par son pouvoir de transformer l’ordinaire en quelque chose de magique’.
Gregory Crewdson est photographe et New Yorkais, mais contrairement à beaucoup de ses concitoyens qui vouent leur œuvre à leur ville, lui, s’intéresse à l’Amérique rurale, sombre, étrange, mélancolique; au coté obscur du rêve américain, aux maisons recouvertes de tapis ovales.
Les mises en scène de ses photos sont minutieuses, l’éclairage souvent artificiel, les sujets translucides et leurs poses dramatiques. Chaque prise de vue suppose un budget pharaonique et le travail acharné d’une armée de décorateurs, stylistes, maquilleurs, éclairagistes, etc.
En regardant ses photos, toujours en grand format (145 x 223 cm), on a froid dans le dos et surtout on a l’impression d’avoir raté un truc, loupé le début du film. Au milieu du carrefour enneigé et faiblement éclairé, une voiture arrêtée, portière conducteur ouverte, conducteur envolé et passager abandonné. Chambre de motel, un nouveau né dort sur le lit, une femme a le regard dans le vague, perdue dans ses pensées. Les photos de Gregory Crewdson ne sont que des questions sans réponse, des lieux où se perdre, rêver, imaginer. Chaque détail demande une attention particulière. Ici, un flacon de pilules renversé, là, des doigts entrelacés.
L’Amérique du nord, froide, isolée, angoissante me renvoie à Twin Peaks. Je crois même entendre la musique lancinante d’Angelo Badalementi. Lequel des personnages que l’on aperçoit sur les photos a-t-il tué Laura Palmer ? Gregory Crewdson ne renie pas être largement influencé par le travail de David Lynch, mais aussi par celui d’ Edward Hopper pour la peinture ; Jeff Wall pour la photographie et la tradition documentaire américaine ; Stephen King pour la littérature ; Steven Spielberg, Wes Anderson et les films d’épouvante et de science-fiction pour le cinéma.
Alors que la chaleur m’accable en ces jours d’octobre tropical, que les moustiques me dévorent, que les corbeaux me rendent dingue, j’ai enfilé mes moufles et respiré un grand coup de froid américain dans une immense galerie aux murs immaculés et à la clim réfrigérante.
Coures y, évade toi et demande toi si le vieux devant la télé est réellement captivé par ce qu’il regarde, ou fait juste semblant pour que Mamie, derrière dans la cuisine, fasse la vaisselle. Remarque à ses pieds, le tapis ovale traditionnel américain tressé à cinq lanières.
Untitled ‘Beneath the Roses’ 2004
Untitled ‘Beneath the Roses’ 2007
Untitled ‘Beneath the Roses’ 2007
Gregory Crewdson expose ses photos pour la première fois en Inde. La série Beneath the Roses ornera les murs de la galerie Sakshi jusqu’au 7 novembre.
Né en 1962 à New York, il est diplômé de la State University of New York, et de Yale. Son travail s’expose dans le monde entier et certaines de ses photos font partie de collections telles que celles du Museum of Modern Art, du Metropolitan Museum of Art, du Whitney Museum of American Art, du Brooklyn Museum, du Los Angeles County Museum et du San Francisco Museum of Modern Art. Il enseigne désormais la photographie à Yale et vit et travaille à New York.
Sakshi Gallery -Synergy Art Foundation ltd.
Ground floor,Tanna house, 11-a, nathalal parekh marg, Colaba, tel: +91 (0)22 6610 3424
Les photos de la série sont réunies dans le livre « Beneath the Roses », préfacé par Russel Banks, publié en mars 2008 par
Harry N Abrams Inc. ISBN 0810993805 ou ISBN 9780810993808.
Bien vus les rapprochements avec Hopper et Lynch. Je trouve que la derniere photo fait tres Frankenstein…Brrrre froid dans le dos! Ds les deux premieres on se demande s’il ya eu un drame ou si le mec est pas juste parti s’acheter des clopes… Et la deuxieme me rappelle le personnage de Julianne Moore ds The Hours… Quand au titre ‘beneath the roses’, je vois tout de suite l’affiche de American Beauty… Bref ca fait cavaler l’imagination!…
sublime article, le rythme de ton écriture accompagne parfaitement l’atmosphère des photos. tu as du respirer un grand coup en sortant de la galerie dans la cohue de la rue bombayotte…