Le Brésil retient son souffle, ce dimanche l’Assemblée vote pour ou contre l’impeachment de Dilma.
Pour te faire patienter, voici quelques informations, qui en plus de te faire passer le temps en te divertissant, te permettront de briller dans les dîners.
La traduction littérale du mot Impeachment (qui est un mot anglais by the way) est : Mise en accusation. Pourquoi les brésiliens au langage si imagé et ensoleillé utilisent-ils un mot anglais pour tenter de virer leur présidente ? L’histoire ne le dit pas. Enfin si, l’histoire le dit un peu. La constitution brésilienne est une copie de l’américaine et là bas ils disent impeachment (qui by the way encore vient du français empêcher).
(comme je n’ai pas trouvé de photos intéressantes d’impeachment j’ai pris la décision unilatérale d’agrémenter ta lecture par des illustrations insolites, ici, un petit chat trop mignon qui regarde des petits poussins)
Tout le monde, oui même toi (si tu es citoyen brésilien et électeur on s’entend) peut déposer une demande de ‘mise en accusation’ du Président de la république. Cette demande doit être argumentée et surtout doit rentrer dans l’une des 8 cases prévues à cet effet.
Le président doit respecter huit règles pour pouvoir gouverner tranquille. Si un pékin arrive à prouver qu’il ou elle ne l’a pas fait, il pourra alors l’accuser.
Je ne sais pas quel pékin a déposé le dossier d’impeachment qui fait trembler Dilma, appelons le Vinicius. Vinicius a donc déposé un dossier auprès du Président de l’Assemblée.
Dans le cas qui nous concerne, Dilma est accusée de « mauvaise gestion » et « détournement de la loi ». Apparemment Vinicius avait bien bossé et blindé son dossier puisqu’il a été accepté par le Président de l’Assemblée, ce qui n’est pas toujours le cas.
(ici, 9 participantes à l’élection de miss Bum Bum qui a lieu tous les ans, pour illustrer les 8 motifs d’impeachment +1)
Comme le prévoit la loi, une commission formée par des représentants de chaque parti siégeant à l’assemblée a été constituée. La commission s’est réunie la semaine dernière et a voté en faveur de l’avancement du processus d’impeachment. C’est maintenant au tour des députés de se prononcer lors d’un vote organisé dimanche. Plus des deux tiers des 513 députés doivent approuver la motion. Si c’est le cas, le dossier poursuivra son petit bonhomme de chemin vers le Sénat. Les sénateurs, qui comme partout dans le monde sont de vieux croûtons, voteront et si le vote est favorable à l’impeachement, Dilma sera écartée du pouvoir immédiatement et c’est son vice président, Michel Temer*, qui pendra les commandes pendant une période qui peut aller jusqu’à 6 mois, temps nécessaire au Président de la Cours Suprême pour étudier le dossier et mener sa petite enquête. Une fois que le Président de la Cours suprême aura donné son avis, les sénateurs devront de nouveau sortir de leur sieste pour voter pour ou contre. Si le « pour » passe, Dilma sera virée séance tenante et Temer gardera les commandes jusqu’à la fin prévue du mandat (novembre 2018) et si c’est « contre », Dilma sera ré-instituée et là on va bien se marrer.
Alors comme disait ma boulangère, « avec des si on mettrait Paris en bouteille » et il reste encore quelques étapes à franchir pour arriver au bout du processus. Mais Dilma commence à avoir sacrément chaud au bum bum. Apparemment le vote de l’Assemblée est décisif. Ceux qui y connaissent quelque chose disent qu’une fois au Sénat, y’a plus de salut (pour Dilma).
On est donc en pleine opération séduction. Les uns et les autres essayent de convaincre les députés de voter pour ou contre. Les principaux soutiens de Dilma l’abandonnent les uns derrière les autres, ils ont dû sentir que c’était pas trop dans leur intérêt de la soutenir. Ce qu’on ne sait pas c’est ce qui leur a été promis en échange de leur vote.
Fun facts de la semaine :
Michel Temer, actuel Vice Président, impatient d’accéder au trône a enregistré sur son smart phone un discours d’investiture, une sorte de « moi président ». Suite à une fausse manip’ de sa part (il a 75 ans quand même, les nouvelles technologies, c’est compliqué), le discours a été envoyé à tous les membres de son parti, et évidemment à la presse. Comme c’est ballot, maintenant, tout le monde sait ce qu’il veut faire pour son pays et comme il serait un bon président si la morue est virée. Opération séduction pas franchement subtile mais apparemment efficace.
La policia federal et le juge Moro ont lancé la 26ème phase de l’opération « Lava Jato* » baptisée « carbone 14 » et enquêtent sur la mort plus que suspecte d’un membre du PT (parti des travailleurs, dont Lula est le chef, remember) en 2002. Celso Daniel, préfet de São Bernardo (une ville de la commune de São Paulo), membre du PT a été kidnappé un soir en rentrant d’un resto. Son corps, sans vie, a été retrouvé quelques jours plus tard dans un terrain vague. Ce qu’on sait : Celso Daniel n’était plus trop d’accord avec les combines de son parti (apparemment des arrangements mafieux avec les camions de ramassage de déchets qui auraient servi à détourner de l’argent public pour financer la première campagne présidentielle de Lula) et les 8 témoins de la soirée, incluant le serveur qui lui a apporté son assiette au resto, sont morts dans des circonstances étranges. A l’époque, l’enquête a patiné, elle patine toujours, mais peut être plus pour longtemps. Maintenant, si les enquêteurs commencent à trouver des cadavres dans les placards, l’opération ‘lava jato’ contre la corruption et le blanchiment d’argent promet de prendre une toute autre dimension. A ce niveau là, c’est plus de la télénovela, c’est « True Detective** ». Manque plus que Matthew McConaughey pour rendre le tout encore plus passionnant.
(Ici Matthew dans toute sa splendeur musclée et bronzée. ça n’a rien à voir me diras tu. Mais si, ça a à voir, Matthew fait du surf comme beaucoup de brésiliens et son épouse est elle même brésilienne).
La suite dimanche, ou peut être lundi. Anyway, Stay tuned !
*voir épisodes précédents
**True Detective est une série policière bien gore dans laquelle Matthew laisse trainer son accent du sud et ses pectoraux musclés.